Investir et s'investir dans le capital risque
La définition du Business Angel se trouve précisément dans ces deux mêmes termes : business et angel. Oxymore à première vue, ces deux dimensions se rejoignent pourtant pour viser un seul et même objet : la réussite entrepreneuriale d'une startup.
Donner du temps et de l'argent.
Marie-Catherine Boinay, Vice-Présidente de l’association de Business Angels Investessor, explique : « L’activité de Business Angel comprend deux faces qui me semblent indissociables : le côté business et le côté angel. »
D’un côté, il y a l’investissement financier dans un projet entrepreneurial dans lequel le Business Angel croit et qui, il l’espère, apportera une plus-value au moment de sa sortie du capital, quelques années plus tard (généralement 5 ans). Cette dimension orientée business comprend également la contribution à la stratégie de la startup et à son développement. Cette implication se traduit par une prise de participation dans la startup, à savoir que les Business Angels acquièrent des actions en contrepartie de leur investissement financier au moment de la levée de fonds. Ils deviennent ainsi actionnaires de la startup, aux côtés du fondateur et de ses associés. Cette prise de participation implique une redistribution des actions et une dilution pour le ou les fondateur(s) qui cèdent une part du capital de leur société. On parle alors de dilution du capital : en cédant des actions, le fondateur et ses associés se « diluent ».
De l’autre côté, la dimension « angel » rend compte de l’investissement plus personnel du Business Angel, qui comprend le temps consacré à soutenir et accompagner le porteur de projet tout en développant une relation de confiance et de collaboration avec lui. Marie-Catherine précise : « Pour ma part, cela se traduit par le fait de challenger les entrepreneurs sur leur projet, leur business plan ou encore leur stratégie, mais toujours dans l’optique de faire progresser le projet ». Au-delà des compétences et de l’expérience, le Business Angel fait profiter le porteur de projet de ses contacts : « Etre angel, c’est aussi faire jouer son réseau professionnel et personnel. » ajoute Marie-Catherine.
Ce temps que l’investisseur en capital innovation consacre à une startup peut commencer bien avant qu’il rejoigne le capital de la société. Dès le process de sélection, un Business Angel peut avoir l’envie de soutenir un entrepreneur pour l’aider notamment à préparer une levée de fonds.
Le process de l’instruction chez Investessor permet d’initier une relation entre un Business Angel et un entrepreneur, autour d’un projet de startup.
L’instruction d’une startup intervient après que celle-ci a été sélectionnée en Elevator Pitch.
L’Elevator Pitch est une session de pitch composée de 5 minutes suivie de 5 minutes de questions / réponses à l’issue desquelles les Business Angels Investessor présents sélectionnent les startups qu’ils souhaitent voir avancer dans le process de sélection en vue d’une levée de fonds. L’instruction consiste en un ou deux rendez-vous entre deux Business Angels volontaires pour mener l’instruction et le ou les fondateurs de la startup.
L’objectif de ces rendez-vous est d’approfondir la connaissance et la compréhension de l’innovation proposée par les fondateurs, pour aider les Business Angels à décider si la startup peut poursuivre le process. L’instruction chez Investessor est une étape très structurée, qui repose sur une méthodologie et des outils éprouvés, pour identifier les startups susceptibles de réussir leur levée de fonds au sein de notre réseau.
Plus tard dans le processus, le Business Angel peut continuer de donner de son temps à l’entrepreneur qu’il a décidé d’accompagner. Que ce soit durant la phase de closing ou après la levée en intégrant le Comité Stratégique de la startup (ce sujet est abordé plus loin dans l’article), le Business Angel se montre présent et disponible pour conseiller, écouter et partager son expérience avec l’entrepreneur. Cette disponibilité se fait toujours sur la base du volontariat et est bénévole. Le Business Angel donne de son temps pour un porteur de projet avec qui il sent une affinité et/ou un projet qui l’intéresse particulièrement.
La notion de risque
La spécificité de l’investisseur Business Angel est qu’il croit en un projet entrepreneurial qui en est à ses tous début. On parle d’amorçage ou de seed. La société est créée, mais elle a quelques mois ou quelques années seulement. Après avoir investi ses propres économies, et aussi du love money en sollicitant famille et amis proches, l’entrepreneur a pu évaluer son marché, commencé à tester sa solution auprès de son marché cible et se constituer une équipe d’associés solide autour de lui. Dans certains cas, la startup peut même déjà se vanter d’avoir des clients et un chiffre d’affaires récurrent.
Quand l’entrepreneur se présente devant des Business Angels pour lever des fonds, il leur propose une opportunité d’investissement dont il valorise les chances de réussite mais dont tous savent qu’elle comporte aussi un risque d’échec. En effet, l’investisseur Business Angel a pleinement conscience que le risque de perdre de son investissement existe et qu’il est élevé (d’où le terme de capital risque) car la société est précisément en phase d’amorçage.
Les bases posées en phase d’amorçage doivent prouver leur pertinence dans la phase suivante, la phase de développement où la croissance est attendue. Les Business Angels interviennent à l’intersection entre ces deux étapes, afin de donner à l’entrepreneur les moyens de développer son idée initiale à une plus grande échelle et rapidement. Dans l’innovation, il s’agit souvent d’une course contre la montre afin d’atteindre son marché avant le concurrent.
Et le crowdfunding dans tout ça ?
Business Angels et crowdfunders sont investisseurs au même titre mais alors que les premiers sont dits « actifs » car ils vont s’impliquer dans le suivi et l’accompagnement des entrepreneurs, les second sont dits « passifs » (même si dans certains cas, les crowdfunders vont participer au développement de la société). De plus, les Business Angels investissent leur argent contre des parts de la société, alors que le crowdfunding peut revêtir différentes formes : donation, don contre récompense, prêt, achat d’actions… Pour faire un choix, l’entrepreneur doit identifier ses besoins et choisir la solution qui lui convient le mieux, sachant que les deux peuvent co-exister. Côté investissement, c’est surtout le profil de l’investisseur qui déterminera s’il s’oriente vers de l’investissement comme Business Angel ou du crowdfunding.
L'accompagnement et le Comité Stratégique
Si l’investissement financier est plutôt simple et standardisé (achat d’actions), l’investissement en temps, ou accompagnement, peut revêtir différentes formes. Comme expliqué plus haut, il y a d’abord l’instruction, où le Business Angel prend le temps de bien comprendre le projet : nature de l’innovation, marché, enjeux, business model… ainsi que de rencontrer l’équipe.
Dès lors que la startup passe l’étape de l’instruction, il s’agit de préparer la levée de fonds et la phase de closing. Là encore, les Business Angels impliqués dans l’instruction continuent de coacher l’entrepreneur afin de le préparer à affronter les autres Business Angels. Cela peut consister à retravailler le pitch, spécifier un point du business model, revoir le business plan, conseiller sur la stratégie marketing…. mais aussi rencontrer l’équipe. Pendant la phase de closing, les Business Angels ayant suivi le dossier depuis le début se font aussi ambassadeurs de la startup auprès des autres membres de l’association. Quand la levée est enfin conclue, une nouvelle phase commence : celle du Comité Stratégique. C’est souvent pour cette phase là que les entrepreneurs sollicitent des Business Angels, à savoir bénéficier de conseils, de contacts, et d’expertises pour les guider dans l’élaboration et le déploiement de leur stratégie de conquête du marché. Un Business Angel est identifié pour devenir le Chargé de Participation, c’est-à-dire le représentant des autres actionnaires Business Angels, et siéger au Comité Stratégique. Ce comité comprend généralement le ou les fondateurs, ainsi que des représentants des actionnaires, qu’ils soient Business Angels ou fonds (chez Investessor, il y a toujours un Chargé de Participation). Le Comité Stratégique est un organe consultatif qui a vocation à faire un point stratégique sur l’évolution de la société ainsi qu’à permettre au fondateur de solliciter conseils et aides auprès de ses actionnaires.
Le rôle de cette entité est d’encadrer la réflexion stratégique des entrepreneurs, sans la remplacer, comme le rappelle Patrick Mamou Mani, Business Angel et également mentor chez WeRaiseStartup : « Je pense qu’il faut un respect mutuel avant tout et ne pas sortir de son rôle. Le Chargé de Participation aide à la réflexion, le fondateur agit et prend les décisions. »
Christophe Le Dref, fondateur de la plateforme Dr Milou pour la mise en relation entre vétérinaires et propriétaires d’animaux de compagnie, l’explique aussi : « En Comité, je me sens davantage avec des associés que des actionnaires car nous réfléchissons tous pour faire avancer le projet. Pour autant, je n’attends pas de mes Business Angels qu’ils gèrent la société. »
Le Business Angel doit voir au-delà de son statut purement « business » pour appliquer les principes « angels », comme l’indique Alain Ilhe, Business Angel et Mentor au sein de l’accélérateur WeRaiseStartup : « Quand on investit en amorçage, il faut rester concentré sur la réussite de la société, avant de penser à son investissement. C’est un facteur important car il permet de s’aligner avec les fondateurs et leur façon de penser. »
Par leurs conseils, le partage de leurs expériences, leurs mises en relation, les Business Angels participants aux Comités Stratégiques aident et soutiennent les entrepreneurs dans leur réussite entrepreneuriale, sans se substituer à eux. Il s’agit d’un accompagnement qui s’inscrit dans la durée et dont la vocation est de prendre fin avec la sortie des Business Angels du capital.
Vous souhaitez en savoir davantage sur le rôle du Business Angel ?
Pour lire l'interview de Marie-Catherine Boinay qui revient sur son activité de Business Angel, c'est ici
Pour lire l'interview d'Alain Ilhe sur le Comité Stratégique de Cizoo, c'est ici
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